Chaos. Ténèbres. Sang.
Ces trois mots décrivent à la perfection la scène se déroulant à Lychtre, la belle capitale de Malackia.

Evangéline a mal. La hampe d’une flèche ennemie dépasse de son abdomen. Autour d’elle, Chevaliers Royaux et soldats de l’Elite Noire se battent. Tout lui semble si irréel… Elle voit, mais refuse de croire. Tandis que la vive douleur causée par sa blessure s’étend peu à peu dans son ventre, les bruits de la guerre se font de moins en moins distincts.

Devant ses yeux écarquillés, les soldats vêtus de noir emmènent femmes et enfants vers leurs lignes tandis que les derniers Chevaliers résistent vaillamment. Peine perdue… Ils tombent un par un sous les coups de ces bouchers envahisseurs.
Et elle n’y peut malheureusement plus rien… Cela fait bien une heure qu’elle n’a plus une once de force magique en elle…c’est la seule raison pour laquelle la flèche l’a transpercée.
Les corbeaux planent dans le ciel, attendant la fin de la bataille qui ne saurait tarder, afin de se repaître des cadavres…
Alors que son ouïe s’amenuise de plus en plus, Evangéline, troublée d’entendre des pleurs enfantins, regarde autour d’elle pour en trouver la provenance. Enfin, ses yeux se posent sur l’origine de ces lamentations : un soldat traîne une petite fille par les cheveux.
La petite résiste de toutes ses forces en criant. Sans doute fatigué par les protestations de la fillette, le soldat la jette à terre et la décapite d’un coup d’épée.
Ce fut le dernier son qu’entendit l’impuissante jeune femme : le cri de l’enfant se transformant en gargouillis alors que le soldat frappait une nouvelle fois, histoire d’être sûr…
Des larmes de rage coulant sur ses joues, Evangéline trouve la force dans un sursaut d’énergie de saisir et de lancer son poignard qui, par chance, alla se planter dans la poitrine de l’homme, assez profondément et juste assez près du cœur pour garantir sa mort mais aussi juste assez loin pour qu’elle soit lente et douloureuse.
Elle n’entendit pas le bruit mat de la lame pénétrant la chair ni le cri étouffé du soldat, mais elle se réjouit d’avoir pu venger l’innocente injustement tuée.

Alors que sa main retombe, un duo de tornades blondes l’entoure afin de la protéger, sans savoir qu’il est déjà trop tard…
Elle s’affaisse, sa vision devenant floue.
Soudain, deux bras puissants la retiennent et, avant de se fermer, les yeux d’Evangéline croisent ceux de son sauveteur : deux magnifiques iris bleu océan qui l’accompagnent dans le néant…

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Lyddie se réveilla à force d’être secouée. Elle se redressa d’un coup et se retrouva face à face avec Eléonore, sa sœur jumelle.
—Ly, ça va ?
—Euh…oui…oui je…je crois…
—Tu es sûre ?
—Oui…oui, pourquoi ?
—Tu criais dans ton sommeil et quand je suis venue voir, tu pleurais aussi… Je te secoue depuis cinq minutes au moins… Et même maintenant, tu trembles et tu pleures encore !
—Ah…oui c’est…possible… je… J’ai fait un cauchemar… C’était horrible… si réel…

Elle raconta tout, la guerre, le sang, la fillette… Patiente, Eléonore l’écouta sans l’interrompre et finit par la prendre dans ses bras lorsqu’elle se mit à pleurer encore plus.

—Chut… Aller, c’est fini… Tu l’as dit, ce n’était qu’un cauchemar… Tiens.

Elle lui tendit un mouchoir que la jeune fille prit.

—Merci…
—Tu veux venir avec moi pour finir la nuit ?

Elle la regarda avec de grands yeux, surprise. Ce n’est pas souvent que sa sœur la maternait ainsi… La jeune fille lui sourit. Reniflante et soulagée, Lyddie se leva et suivit sa sœur avec son oreiller. Deux yeux bleus dont elle avait omis de faire mention la hantaient…

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