Enfin libérer de l’interrogatoire de son père, il s’empressa d’aller à l’entraînement pour évacuer le stress qui le rongeait peu à peu.
Arrivé, il aperçut Varro qui s’entrainait. En se rapprochant de plus près, il vit qu’il était en plein duel avec Drac Onis, l’invaincu. Surnommé ainsi car tous les membres de sa famille étaient des guerriers avertis et qu’aucun de ceux qui avaient mené la guerre, n’étaient tombés au combat. Et ce fut le cas, Varro perdit le combat après une feinte des plus remarquable de la part de son adversaire. Drac était quelqu’un de vaniteux et de cruel. Grand avec des cheveux bruns coupés ras, il avait des yeux noirs avec à son centre un léger point qui lui servait d’iris. Il était bien bâtit avec des pectoraux et des abdominaux des plus impressionnants. Bien qu’il fut séduisant et enjôleur, cela ne trompait personne, seul son ami Gant, effacé et peu sûr de lui, comptait parmi ses amis. Bien que dénué d’intelligence, il était persuadé d’avoir toujours raison et que les autres n’y comprenait rien. Seul le combat comptait à ses yeux, c’était sa seule vocation. Il prenait un malin plaisir à tromper les gens et les mettre dans l’embarras. Plusieurs fois, il avait proposé à Exéus de se joindre à lui pour l’entrainement mais il n’avait obtenu qu’un droit de non recevoir. Il avait cru pourtant fermement qu’en alliant leurs forces, ils pourraient être les dieux de Cryon et faire régner la loi. Les refus d’Exéus l’avaient indigné et il devint à ses yeux son principal rival. Quant Exéus s’approcha d’eux, Drac le reconnut et ne put s’empêcher de le provoquer:
– Tiens, tiens, Exéus, quelle surprise! Enfin prêt à m’affronter ?
– Désolé vieux, mais j’ai n’ai pas pour projet que de me battre avec un bon à rien.
Drac ne prit pas le commentaire à la légère et l’exhorta en le poussant en arrière. Il trébucha et tomba à terre. Les nombreux observateurs qui avaient assisté à la scène attendaient la réaction d’Exéus. Un conflit n’avait pas eu lieu depuis bien longtemps.
Exéus se leva et se jeta sur Drac.
– Et bien que se passe t-il? Tu veux te battre contre moi aujourd’hui? Tu ne préfère pas capituler? dit-il sur un ton ironique tout en le repoussant. Tu aurais dû t’allier avec moi lorsque je te l’ai proposé. On en serait pas là aujourd’hui!
Soudain Exéus retrouva la parole.
– Je ne regrette pas un seul instant.Tu n’es qu’un vaurien sans cervelle!
Pour Drac s’en était trop, il saisit une épée et s’apprêta à le transpercer. Alors qu’il allait enfoncer la lame, une flèche le toucha au niveau de sa jambe droite. Son épée s’immobilisa et il s’effondra sur le sable couvert de son propre sang. La foule poussa alors un cri de panique. Elle chercha le tireur et posa son regard sur Varro. Exéus se releva et aida Drac à en faire de même. Une coulée de sang s’échappa de sa jambe. Le père de Drac qu’Exéus n’appréciait pas plus arriva peu de temps après l’accident. La nouvelle s’était répandue dans tout les alentours. En arrivant près de son fils il observa sa blessure et sortit un grand mouchoir blanc de sa poche qu’il pressa contre la plaie. Il aida ensuite son fils à marcher quelque pas et cria haut et fort à toute la foule.
– Que celui qui à infliger ça à mon fils se désigne immédiatement où je le trouverai de moi même et il en subira les conséquences!
Après un moment, voyant que la foule s’était tue, il prit Drac par le bras et partit hors de lui, vers Medicus pour qu’il soigne sa plaie. Une fois que Drac et son père furent partis, la foule se dispersa et l’arène se vida peu à peu. Exéus se dirigea vers Varro pour le remercier de lui avoir sauver la vie.
– Hé bien! Tu as été merveilleux. Je n’aurai pas fait mieux. J’ai une dette envers toi maintenant.
– Merci! Je n’ai fait que mon devoir d’ami. En voyant cette tête de mule, je n’ai pas pu me retenir. J’ai saisi mon arc et j’ai tiré à un endroit qui le forcerait à s’arrêter sans trop le blesser. Sa jambe me semblait être un bon choix.
– C’était bien réfléchi, tu as un talent incontestable avec ton arc.
Entre temps,Ganateon, le père d’Exéus débarqua dans l’arène désormais vide. Il aperçut son fils et s’approcha de lui.
– Que s’est t-il passé ? Pourquoi y avait t-il autant de monde ?
– Eh bien dit Exéus gêné, j’ai eu quelques problèmes. Mais rien de grave je t’assure.
– Tu t’es encore querellé avec Drac ? ce n’est pas difficile à deviner.
– Il m’a provoqué, je n’ai fait que me défendre. Un de mes propos l’a blessé et il s’apprêtait à me tuer. Heureusement, Varro était là, il m’a sauvé en tirant une flèche dans sa jambe.
Ganateon n’avait pas l’air de bien comprendre la situation. Il écoutait à moitié l’histoire de son fils.
– Bien, bien. Alors si tu n’as fait que te défendre, c’est d’accord.
Il parlait cependant bizarrement et semblait préoccupé. Son esprit semblait ailleurs. Il partit rapidement comme hypnotisé par quelque chose.
-Tu as remarqué que ton père avait un comportement étrange. Il ne t’écoutait même pas, je suis sûr qui si tu lui avais dit que tu l’avais tué il se serait comporté de la même manière.
– Tu as raison. Suivons-le.
Ganateon se dirigeait vers les portes de la Paix. Soudain, il se retourna et faillit voir Exéus et Varro. Heureusement, ils purent se cacher juste à temps. Malheureusement quelques secondes plus tard, il avait disparu. Il s’était volatilisé, plus aucune trace de lui. Ils n’en revinrent pas. Comment avait-il fait? il n’y avait rien aux alentours pour se cacher, seulement une longue route.
– Où a t-il pu aller ? se demanda Varro
-Il n’y a rien à côté s’étonna Exéus. Ni d’auberge, ni maison, rien. Il peut se cacher nul part.
La discussion prit fin et ils se donnèrent rendez vous à onze heures le soir même pour aller rejoindre Eldor et sa fille. En rentrant chez lui, il ne trouva ni son père, ni sa mère. La maison était totalement vide. Il n’y avait aucun mot lui expliquant où ils étaient partis et trouva tout cela de plus en plus étrange. D’abord la disparition de son père dans l’arène et maintenant c’était au tour de sa mère. Il se passait décidément, quelque chose et il n’en avait pas la moindre idée. Pour la première fois, il s’aperçut que le médaillon avait prit une teinte rougeâtre. Il ne savait pas pourquoi. Exéus était trop fatigué pour se poser des questions et préféra aller se coucher en espérant que ses parents seraient de retour au matin. Soudain, il se souvint d’Eldor et regarda sa montre. Il était dix heure cinquante, il lui restait par conséquent que dix minutes pour aller le retrouver. Il sortit alors de la maison et se mit en route. Il avait donné rendez-vous à Varro de l’autre côté de sa maison. Il s’y rendit et le trouva comme prévu.
– Tu ne me croiras jamais, mes parents ont disparus.
– Tu plaisantes!
– D’abord mon grand-père qui est assassiné et maintenant mes parents qui disparaissent. Tout cela ne peut être le fruit du hasard. Que dois-je en conclure?
Ils se regardèrent et continuèrent leur chemin vers l’auberge du Corbeau où Eldor leur avait donné rendez-vous.
En marchant quelques personnes dévisagèrent Varro. Son tir sur Drac à l’arène un peu plus tôt dans la journée avait apparemment marqué les esprits. Au loin, ils virent la fameuse auberge. Le bâtiment ressemblait à la maison de Varro en deux fois plus grand. Il était entièrement construit en bois et en pierre. A l’entrée, une grosse pancarte indiquait le lieu « L’auberge du Corbeau ». Eldor leur fit signe de rentrer à l’intérieur. En poussant la porte de l’établissement, Exéus découvrit une grande salle avec un grand bar, des tabourets ainsi que plusieurs tables de bois avec posées dessus des chopes de bières et d’autres boissons. Il y avait évidemment plusieurs ivrognes à chaque table qui buvaient et rigolaient tellement bruyamment que le son de la voix d’Eldor était minime. Ils prirent un long couloir et entrèrent dans une petite chambre que le vieux mage avait loué pour la nuit. La pièce donnait sur un jardin et était relativement spacieuse. Il y avait un grand lit pouvant accueillir trois personnes ainsi qu’une grande table et des chaises. Ils s’assirent tous autour et Eldor présenta sa fille. Exéus regarda la fille d’Eldor, sa grande cousine. La dernière fois qu’il l’avait vue, elle devait avoir cinq ans. Elle avait aujourd’hui son âge et avait bien changée. Elle avait de long cheveux bruns ondulés et des yeux en amandes bleus azur. Elle n’était pas très grande mais avait la taille parfaite pour une femme. Son regard des plus intrigant dégageait un air mystérieux. Exéus resta figé sur Dana sans s’en rendre compte. Après quelques secondes, il remarqua que tout le monde le dévisageait, surtout Eldor qui ne cacha pas son mécontentement. Même Dana fixait Exéus à présent, elle avait l’air flattée mais n’en laissa rien paraître devant son père. Ce fut Eldor qui brisa le silence et parla le premier.
– Bon, ça y est, en regardant Exéus, peut-on parler de choses sérieuses maintenant ?
– Oui bien-sûr dit Exéus un peu gêné.
– Bien, comme je te l’avais déjà dit, c’est une mission à risque et on ne peut s’y engager sans y être suffisamment préparé, c’est pourquoi nous devons élaborer une stratégie. Je veux que le nom de « Mandore » tombe à jamais dans l’oubli. Je ne veux plus de morts innocents comme celle de ton grand père. Ma fille Dana et moi même feront tout pour t’aider.
– Très bien dit Exéus c’est ce que nous voulons tous, je crois.
– Avant toute chose, nous allons nous présenter pour mieux apprendre à nous connaître dit Eldor en s’adressant à Varro. Je m’appelle Eldor Mogue, je suis le frère dAugurre 2 et suis un mage de catégorie trois. Je peux donc par conséquent utiliser des pouvoirs magiques qui nous seront très utiles lors du voyage.
– Comme quoi? dit Varro qui parla pour la première fois.
– Et bien je peux par exemple créer des éclairs et je peux agir également sur la terre en créant un tremblement mais tout cela ne dure qu’un temps.
– Dément! dit Varro. C’est tout?
– Non je suis aussi télépathe et j’en ai quelques autres encore mais inutile de tous les citer.
– C’est incroyable cria Exéus qui ne se doutait pas de l’importance des pouvoirs de son grand-oncle.
– Doucement mon jeune ami, personne ne doit nous entendre.
Se tournant vers sa fille, il l’invita à poursuivre.
La jeune fille prit donc la parole.
– Je suis Dana, la fille d’Eldor. Je n’ai pas les talents de mon père mais je sais beaucoup de choses sur les plantes et leurs effets. Je peux donc avec un brin Magnole et une branche de Colis guérir une blessure quelconque. Je vous serai très utile si jamais vous êtes blessés. Je ne me défends pas trop mal au combat non plus.
Varro vit que tout le monde l’observait et il comprit que c’était à lui de se présenter.
– Je suis Varro dit-il un peu timidement. Je n’ai pas beaucoup de talents mais je sais tirer à l’arc.
Voyant qu’Eldor et sa fille n’avaient pas l’air convaincu, Exéus expliqua que Varro lui avait sauvé la vie. Il leur raconta le combat avec Drac qui s’était produit plus tôt dans la journée. Eldor le coupa.
– Très bien, on te fait confiance, sors plutôt la carte de Cryon que ton grand père t’a légué.
– Exéus fouilla dans sa poche et sortit la carte pliée en quatre pour qu’elle puisse tenir dans sa poche. Il la posa sur la table et la déplia. Cryon s’ouvrait à eux. Eldor s’en empara avec une vitesse surprenante et l’observa pendant quelques instants. Il releva la tête, regarda autour de lui et commença à expliquer sa stratégie.
– Nous sommes ici, dit-il en pointant RealSand, qui se trouvait au sud de la carte. Nous partirons par vers l’est, vers Rochevreux, ensuite nous irons à Traux voir un vieil ami qui pourra nous aider. C’était un ancien voyageur qui s’est rendu sur les montagnes maudites autrefois et qui pourra peut-être nous en dire plus. Après, nous nous dirigerons vers Emon, Tevargues et Menosque et nous pourrons enfin atteindre le port de la BloodSea pour rejoindre le continent de Gauche.
– Quand partirons-nous ? dit Exéus.
– Dans trois jours, nous ne devons pas… Mais il s’arrêta de parler et regarda furtivement par la fenêtre et se leva d’un seul coup. Exéus remarqua que son talisman lui brûlait le torse et qu’il avait prit une teinte jaunâtre. Eldor se dirigea vers la fenêtre entre-ouverte et vit Drac qui les espionnait. Il le saisi par le cou et le força à rentrer. Tout le monde fut surprit de le voir ici. Exéus était furieux et voulut se jeter sur lui. Eldor l’arrêta juste à temps. Il prit Drac par le col et l’obligea à s’asseoir.
– QU’EST-CE QUE TU FAIS ICI ? hurla t-il à l’encontre de Drac.
Personne n’avait vu Eldor aussi énervé, pas même sa fille qui fut la plus surprise.
– Rien, je ne voulais pas…
Drac était mort de peur face à un Eldor qui faisait pourtant deux tailles de moins que lui. Il n’arrivait même pas à finir ses phrases. Ce n’était plus le garçon arrogant et désagréable de l’arène, il était livide.
– Je ne l’ai pas fais exprès, je vous le jure, ne me tuez pas supplia t-il.
Eldor était dubitatif. Il était cependant obligé, à regrets, de le laisser partir. Il ne pouvait pas se permettre de lui faire le moindre mal. Son père n’était pas un tendre et le temps n’était pas à la discorde. Il décida de l’effrayer simplement afin de le dissuader de les suivre ou bien de répéter ce qu’il avait entendu.
– Que je ne t’y reprenne pas lui assena t-il, enfin. Sors d’ici et ne reviens plus!
C’était jouissif de voir Drac si effrayé, lui qui n’avait peur de rien ni de personne. Eldor le relâcha et le laissa s’en aller.
– Vous croyez qu’il a entendu quelque chose? demanda Varro.
– Je ne l’espère pas, car si jamais il a connaissance de l’endroit où l’on se rend, cela pourrait faire échouer toute la mission.
Son père est un fouineur, s’il sait ce que Drac a entendu, il voudra sûrement en avoir le coeur net et il nous suivra. C’est pourquoi, vous devez faire extrêmement attention à ce que vous dîtes. Personne ne doit être au courant.
Tous acquiescèrent.
– Que devons nous emmener pour le départ? demanda Exéus.
– Emmener le strict nécessaire, nous ne devons pas attirer l’attention. Seules ta carte et ton épée suffiront. Munissez-vous également d’une arme, quelque fût-elle et n’oublie pas ton médaillon finit-il par dire en s’adressant à Exéus.

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