Le loup me coula un dernier regard, puis se détourna. Sans savoir pourquoi, je sus instinctivement que je devais le suivre. Me relevant tant bien que mal, je jetais un coup d’œil autour de ma position, histoire d\’essayé de me repérer. Puis je sus ce qui cloché. D’où venait cette impression de manque qui me turlupiné depuis mon réveil. La sensation que l\’on a oublié quelque chose, mais sans savoir quoi. Dans mon cas, honte à moi, il s\’agissait de ma sœur. J\’étais tellement perturbé par les événements en cour, que j\’avais oublié jusqu\’au fondement même de son existence. Alors que quelques heures auparavant, je juré à feu mon père, que je veillerais éternellement sur elle. Elle remarqua ma présence et me sourit. Malgré la présence des loups à ces côtés, qui semblaient la reluqué de la tête aux pieds. Pressant le pas, je me hâtais de la rejoindre. Elle se jeta dans mes bras et tandis que son frêle corps tremblés sous mes doigts, me demanda si les loups allaient nous dévorer.
-Mais non, ne t\’inquiète pas. Tu n\’as pas à t\’en faire.
Même si, je ne croyais pas moi-même à ce que j\’avançais. Enfin en partit. Père m\’avait bien fait comprendre, lors de cette soirée mémorable, que les loups étaient inoffensifs pour l\’homme. Mais des exceptions étaient sans doute possibles. Et je dois dire qu\’en ce moment précis, je commencés fortement à remettre sa thèse en question. Mais je n\’avais pas le droits de montrer ma peur, de me montrer faible. Par égard pour Lanara, et pour Agron, qui m\’avait accordé sa confiance. Faisant de moi le tuteur, sous serment, de ma sœur. La lumière qui devrait la guider dans les ténèbres. Il attendait de moi, que je prenne les rennes de notre destinée. Pour accomplir cette tâche, je devais me montrer fier, et ne pas flancher devant l\’adversité.
– S\’ils avaient voulus nous dévorer, ça serait déjà fait. Pourquoi avoir pris le risque que l\’on se réveille, ça leurs auraient étaient bien plus facile de nous tuer pendant notre sommeil.
-Mais ils sont terrifiants. Thartos ils me font peur.
-Je te mentirais, si je te disais que ce n’est pas mon cas aussi.
-Mais tu as l’air si calme, si serein.
-Ce n’est qu’une façade. Au fond je suis aussi terrorisé que toi
-Mais comment fait tu pour masquer, aussi bien, tes véritables sentiments
-J’essaie juste de minimiser la situation.
Je lui raconté donc ma petite escapade nocturne, et ce que notre paternel m’avait enseigné. Les étoiles qui illuminèrent ses beaux yeux auburn m’apprirent qu’elle buvait mes paroles.
– De plus, je sais qu\’il ne faut pas se fier aux apparences. Tu te souviens du vieux Vernon. Les plus folles rumeurs circulaient à son sujet, à tel point qu\’au début, aucun de nos amis n’osaient approcher de sa maison. Alors qu\’au bout du compte, il s\’agissait simplement d\’un vielle homme que la dureté de la vie, avait aigri.
-Je vois ce que tu veux dire, mais ce n\’est pas tout à fait la même chose. On ne peut pas comparer un être humain à un animal.
– Ma chère sœur, ça c\’est un préjugé, et ce sont des fléaux. Ils obscurcissent notre jugement. A cause d\’une minorité qui commet tel ou tel acte, on se permet de juger tout un peuple. Comme si les fautes des uns incombaient aux autres. C\’est comme si tu disais que les hommes du villages étaient égaux à ceux d\’ Anthranax. Dans la forme peut\’ être, mais certainement pas dans le fond. Maintenant, pose-toi une question. Qu\’est-ce qui différencie l\’homme de l\’animal, quand tu vois les atrocités que Anthranax vient de commettre. Pour moi, ce sont eux les véritables animaux. Car ils tuent et pillent sans autre motivation que le plaisir de nuire. Les loups eux ne chassent que par nécessité, pour se nourrir, et protéger leurs petits. De toute façon, on n\’a pas vraiment le choix. On se doit de les accompagner, si l\’on ne veut pas finir dans leur estomac. Illustrant mon propos en me passant la langue sur les lèvres.
– Thartos ! Arrête ça, je t\’en prie.
Elle semblait au bord de l’hystérie.
-Désolé, je ne voulais pas t\’effrayer. J\’essayais juste de détendre l’atmosphère.
-Eh bien, c\’est raté.
– Pardonne-moi sœurette, parfois je m\’égare. J\’ose espérer que tu ne m\’en tiendras pas rigueur.
-Non, bien sûr que non. Mais à l\’avenir, évite les réflexions de ce genre en ma présence. Du moins pendant un certain laps de temps.
-Je comprends, encore désolé.
Puis, au terme d\’une courte mais intense escapade, alors que l\’aube commençait juste à se lever. Les premiers rayons du soleil matinal peinant encore à percer la froideur de la nuit. Nous arrivâmes à bon port. Toujours escortés par nos fidèles compagnons à quatre pattes. Qui allaient devenir dans un futur proche, nos plus chers amis. En quelque sorte une nouvelle famille.
Lors ce qu\’elle se présenta, devant mes yeux ébahis, pour la première fois. Je crus, que je nageais en pleins songe. Après tout, se pouvait \’il que toute cette histoire, ne soit qu\’un mauvais rêve. Que d\’une minute à l\’autre, j\’allais me réveiller, bien au chaud dans mon lit. Lanara, avachi dans le sien, de l\’autre côté de la pièce. Le lait chaud de mère, m\’attendant dans un bol dans la cuisine. Le sourire malicieux D\’agron, avant qu\’il ne m\’ébouriffe la tête. Et surtout, Zephir. Mon ami, mon soleil. On s\’était juré, une amitié éternelle. De celle qui vous accompagne même dans la mort.
-Non, les douleurs qui cerclaient mon corps meurtri et la faim qui commençait à me tirailler l\’estomac était bien trop poignante pour être simplement le fruit de mon imagination. Elle était réel, et par conséquences, tout ce que nous vivions aussi. Donc, plus jamais je n\’aurais l\’occasion de subir les réprimandes de père et de sentir l\’odeur du savon de Bergamote sur la peau de ma mère. Quant à toi, mon frère. Je t\’avais laissé tomber, abandonné à ton triste sort. Je n\’avais pas pu tenir ma promesse. Mais je ne t\’oublierai point, ta mémoire ainsi que celle de tous les habitants D\’Ambers resterait en moi à jamais.
-Mais tous ces tourments, fondirent comme neige au soleil face au cadre idyllique qui m’entourait. On venait de pénétrer dans une petite clairière, niché au cœur même de la foret. Véritable havre de paix, dans les ténèbres qui menaçaient de se déverser sur le monde. Un sanctuaire à la gloire de la vie et de la beauté. Ici, la vie semblait encore immaculée. J’aperçus de gros lièvres courir au milieu de parterre de fleur et dans le lointain, des cerfs s’ébrouer gentiment. Tout, inviter à la contemplation et à la détente, que ça soit les senteurs des fleurs sauvages ou le vol harmonieux des papillons voletant autour de ces dernières. Il émanait de cet endroit, quelque chose de mystérieux, d\’irréaliste. Cela faisait des années, que notre père partait en escapade dans la foret, parfois seul, parfois en compagnie des chasseurs et des qu\’il revenait, il nous racontait dans les moindres détails ses nouvelles découvertes. Nul doute, qu\’un tel lieu eu put lui échapper, il connaissait Hagen dans ces moindres détails. Et pourtant, jamais il ne fit allusion d\’un tel site, ni personnes d\’autres d\’ailleurs. Alors qu\’un tel lieu aurait dû subjugué les esprits.
Pourtant, tout semblaient si réel. Le contact du sol sous mes pieds, l\’oscillation des Campanules et des Ficaires printanières, sur mon passage. Le chant des Mésanges et des Étourneaux ainsi que le bourdonnement des insectes.
-Waouh, c\’est magnifique.
-Houai, trop pour être vrai.
-Tu sais que tu as le chic pour remonter le moral.
-Je suis réaliste, c\’est tout. On vient juste de quitter un Anchorr, et on tombe sur un Nyx. Il y a anguille sous roche.
-Tu ne peux tout simplement pas, profiter de la beauté de l\’instant. Sans te prendre la tête, en considération inutile.
-C\’est vrai, je me complique peut être inutilement la vie. De plus s’ils nous ont conduits ici, il y a sans doute une raison, et eux ils sont tout ce qu’il y a de plus réel. Je sens encore l’haleine fétide de mon . Dis-je en exprimant une grimace de dégoût.
Dans la clairière, se dressait un chêne de toute beauté. Tellement magnifique, que j’en eu le souffle coupé et les larmes aux yeux. Mon cœur se mit à battre la chamade, et un sentiment d’extase et de plénitude m\’envahit. Comme une voix intérieure, qui m’incitait à m\’allonger dans l\’herbe fraîche. En laissant de côté, tous mes soucis. Amor rah, que c\’était dur. Une part de moi, rêvait de me laisser tomber dans le tapi végétal et une autre m’exhortai à continuer, à ne pas abandonner mon combat. Finalement ma combativité l\’emporta, chassant ma morosité dans un morne recoin de mon esprit. Ma lucidité retrouvée, je tournai la tête juste à temps, pour voir Lanara sur le point d’entrer en communion avec la terre nourricière. Tendant le bras, je l’empêché in extremis de choir.
-Qu\’est-ce que tu fais ! Dit\’ elle en me lançant un regard dédaigneux.
-Ce serait plutôt à moi de te le demander. Qu\’est ce qui ta prit ?
-Comment ça ! Je n\’ai plus le droit de m\’allonger maintenant. Dois-je te rappeler ta promesse.
-Pas la peine, je l\’honore actuellement.
M’- En empêchent de me reposer. Dans ce cas, tu n\’auras plus beaucoup à t’inquiétais, si je meure prématurément d’épuisement.
-Tais-toi, et écoute. Depuis quand, ressent tu l\’envie de te reposer ?
-Qu\’est-ce que tu me chante là ?
-Réfléchis un peu, nous avons dormis une bonne partit de la nuit, et à ton réveil était tu fatigué. Non, je ne pense pas. Il est vrai que la randonnée jusqu\’ici à était intense je le reconnais, mais courtes. A voir la position du soleil, nous n\’avons pas marchés, plus d\’une heure. Soit, pas assez pour nous mettre dans un tel état de fatigue, du moins à mon humble avis. Maintenant, souviens-toi de ton arrivée dans la clairière, de ce que tu as ressenti à ce moment-là.
Je la vit déglutir péniblement.
-C\’est vrai, tu as raison. C\’est à cet instant, que j\’ai commencé à me sentir partir.
-Exactement, et pour tout te dire, je pense que nous avons étaient affligés par cet état de somnolence bien avant. J’ai commencé à ne plus avoir les idées claires à l\’orée de la clairière. Et c\’est allé en s\’intensifiant au fur et à mesure que l\’on progressait en son saint. Maintenant, tu comprends mon scepticisme de tout à l\’heure. Mais le point d\’orgue à était atteint, quand nous sommes arrivés devant cet arbre, dis-je en désignant le magnifique chêne qui trônait devant nous.
Immobile, inflexible, il ressemblait à un suzerain en train de juger ses sujets. Effectuant une rotation sur moi-même, je me rendis compte qu\’il siégeait quasiment au centre de la clairière. Un signe de pouvoir et de respect. En Amérique, les imperators et autres représentants du pouvoir étaient toujours représentés au centre. Représentation philosophique du tout, le centre de la vie, de l’univers. C\’est pourquoi, comparé aux autres continents les trônes de nos hauts responsables ne se situaient pas au fond de la salle royale mais en plein centre.
– Là, j\’ai senti mes dernières forces m\’abandonner et mon esprit s\’enfoncer dans une douce torpeur. J\’ai bien faillit lâcher prise, et laisser la douce sensation d\’extase qui s’écoulait en moi, m’emporter. Mais le souvenir, de père et de mère effondrés devant nous, se tordant de douleur, ainsi que les centaines de cris de souffrances, entendues lors de notre escapade dans le souterrain, me ramenèrent à la raison.
Les habitants D\’Ambers comptaient sur nous, on n’avait pas le droit de les abandonner, de les oublier.
-Maintenant, dit moi ce que tu ressens.
Voyant qu\’elle perdait pied, j’approfondis ma pensée.
– Au niveau de ta condition physique. Te sens tu toujours aussi fatiguée.
L\’imperceptible clignement des yeux, qui tira ses traits un court instant, me fit comprendre, qu\’elle venait de prendre pleinement conscience de notre situation actuelle.
– C\’est vrai, je ne suis plus du tout patraque. Enfin pas plus que je ne devrais l’être après une randonnée en forêt. Mais pourquoi, je ne m\’en rends compte que maintenant ? C\’est vraiment bizarre Thartos.
Je rivais mon regard dans le sien « je vois que tu commences à comprendre. Et pour ta gouverne, sache que cette lassitude passagère, qui nous a affligées, s’est estompé, dès que j\’ai réussis à reprendre le contrôle de mon esprit.
-Mais qu\’est ce qui a pu nous accabler de la sorte ?
-Honnêtement ! Je n\’en sais rien. Mais je suis sûr d\’une chose, c\’est que je ne resterais pas un instant de plus ici. En attendant que ça se reproduise.
Je lui saisis la main, tournai vivement les talons, et me figeai, le souffle court. Deux puissantes pattes s’abattirent sur ma poitrine, me faisant choir sur le sol et une énorme gueule béante s’immobilisa à deux centimètre de ma tête. Libérant un mince filet de bave à l’odeur peu ragoutante. Si ça continuait ainsi, à la fin de la journée j’allai sentir plus mauvais qu’un cadavre en décomposition.
-Non! se mit à hurler Lanara, tandis que deux grosses larmes, traçaient des sillons sur son visage poupins.
On dit, d\’une personne désespérée, qu\’elle peut accomplir des miracles. Quand on se retrouve acculé, tout espoir semblant vain, le temps semble ralentir, et notre esprit s\’ouvrir à de nouveaux états de conscience. En notre for intérieur, nous appréhendons alors le monde, sous un angle différent. Dans lequel, une multitude de possibilité se révèle à nous, qui nous permettrait si on choisit le bon embranchement, de sortir de l\’impasse dans laquelle on se trouve. De changer notre destin. Malheureusement, la plupart des personnes qui ont vécues cette expérience, n\’ont eu aucun contrôle sur elle. La peur leur nouant les tripes. Quant\’ à celle qui ont réussi à changer leurs destinée, elles sont bien incapable de dire, ce qui s\’est passée. Se contentant de dire qu\’elles ont accomplie ce qu’elle pensait devoir faire.
On nomme cet état en dehors du temps et de l\’espace, L\’entropie.
Rare sont les individus réceptifs à cet état et encore plus, ceux capable de le contrôler.
Mais en cette douce matinée de printemps, alors que ma vie ne semblait tenir qu\’a un fil. Je suis heureux de vous dire que je fus témoin, de ce que je pense être l\’un de ces événements. D\’une courbure dans l\’espace-temps.
Lanara d\’ habitude si douce, si gentil, qu\’elle ne ferait pas de mal à une mouche. Se ramassa sur elle-même. Prête à bondir, sur le loup qui entravait mes mouvements. Mais alors qu\’elle s’élançait, une inconnue attira son attention, la coupant net dans son élan.
Tournant lentement la tête, pour ne pas donner de raisons supplémentaires à mon geôlier, de m\’arracher la gorge. J’entraperçus, ce qui l’avait interpellé.
Sortant de l\’ombre du Chêne, un autre loup qui plus est aussi imposant, que celui au pelage d\’ébène. La dominait de toute sa prestance.
A la différence près, que la robe de celui-ci était d\’un blanc immaculée. Sa démarche
claudicante laissait supposer, qu\’il avait connu des jours meilleurs. Plusieurs taches brunes, sur sa toisons corroborait mon impression d\’avoir un très vieil animal, en face de moi. Sur ses pattes postérieures, deux creux partiellement recouverts de poils formaient un inquiétant dégradé. Mais le plus mystérieux, restait sans l\’ombre d\’un doute ces pupilles dorées, dans lesquels se lisaient une sagesse sans âge.
Il tourna deux fois autour de nous, comme s’il nous détaillait sous toutes les coutures.
Lanara, si fier et si courageuse, il y a quelque instant, c\’était décomposée. Toute trace de combativité aillant déserté sa personne.
Puis il s\’immobilisa, nous renifla et finit son étrange rituel en nous lapant le visage.
-Pouah, c\’est dégouttant, lâcha Lanara.
Malgré la peur qui m’enserrait les tripes, je ne pus réprimer un sourire.
Ma sœur était comme ça, quel que soit la situation, elle avait toujours le mot pour rire. C\’était sans doute dut au fait, qu\’elle avait encore un pied dans l\’enfance. Moi, les expériences que l\’on venaient de vivre avait changé ma nature profonde, en bien ou en mal me dirait vous. Je ne saurais vous répondre. J\’étais devenu plus fort, plus sûr de moi. Cette période de ma vie, pourtant si proche, me paraissait déjà lointaine.
Pour survivre, je ne pouvais me permettre, de continué à penser comme un enfant. Il fallait que je mûrisse, que j\’évolue. Mais le fait que j\’ai ri, à la remarque de ma sœur, me prouvait que j’avais encore du chemin à faire. Au fond de moi, j\’étais toujours le même petit garçon fragile et terrorisée, qui venait de perdre ses parents. Et qui, par un coup du sort se retrouvait livré à lui-même dans un monde devenus fous. Tout en se voyant attribué, la responsabilité colossale de veiller sur sa sœur.
Au bout du compte, ce n\’était peut-être pas si mal de se relâcher un peu. Car le rire est synonyme d\’espoir.
Le loup, qui me plaquait s\’éloigna.
Ainsi commença notre nouvelle vie, au saint de la meute.
55