Le manque t’empêche de te tenir droit, tu as d’énormes difficulté à faire entrer la clef dans la serrure, tu trembles fortement. Tu t’écrases plus que tu n’entres dans la pièce, tu ne contrôles plus ta démarche renversant tout sur ton passage, plus ton cerveau enregistre la proximité du Pluralis plus il te urge de se dépêcher, tu vomis en chemin, manque de t’étouffer mais ton organisme refuse de s’arrêter pour si peu, tu rampes plus que tu ne marches jusqu’à ta boite de comprimé. Tu ravales les vomissures qui ne sont ni sur tes vêtements ni sur le sol, emportant le comprimé. Enfin apaisé tu t’endors.
Tu te réveilles au son de l’aspirateur, étrangement bien, en fait si bien que tu peux à peine bouger. Ton corps continu de réagir à la crise de manque de la veille, la prise de “Pluralis” qui suit crée une surproduction d’endorphine. Tu appelles ca l’effet “Teletubbies”, le monde est beau, les pigeons roucoulent harmonieusement, le moindre reflet apparait comme un miracle de la nature quelque chose à regarder beat pendant 10 minutes. Quelque part aux tréfonds de ton esprit quelque chose te dit de prendre une dose de morsure, au moins jusqu’à que ce que les effets s’arrêtent… tu ne sais plus trop pourquoi, tu n’arrives pas à enregistrer que quelque chose d’étrange se passe. Tu roules dans ton lit, pour tenter d’approcher de ta pharmacie dans ta table de chevet, et tu t’aperçois avec bonheur que ton petit déjeuner t’y attend. Quelle charmante initiative… ça a l’air bon tout ça. “Qui a fait ça?” “Pourquoi” “Il y a quelqu’un ici, qui cela peut-il être?” Ces questions fusent à un niveau tellement bas de ton cortex que tu ne les enregistres presque pas consciemment. Tu manges de bon appétit, tu te recouches, un sourire béat aux lèvres. Tu sais que tu es en pleine crise d’après manque, l’équivalent de la gueule de bois, mais avec les effets contraires. Cela peut durer quelques heures, chez toi, quelques minutes, le temps de regarder avec délectation ton érection, elle disparait presqu’aussi vite que tu l’aperçois, quand tu te souviens qu’à cause du Fidelis tu n’es pas censé en avoir. Tu prends pourtant la nouvelle comme une immense victoire, et sourit béatement pendant les 5 prochaines minutes, jusqu’à ce que ton humeur redevienne à peu près normale. Le son de l’aspirateur devient alors quelque chose de menaçant, le petit déjeuner aussi… jusqu’au fait de te retrouver dans ton lit. Tu te relèves à l’affut, l’esprit légèrement embrouillé, les souvenirs de la veille te reviennent. Que s’est-il passe pendant que tu étais sans connaissance? Interpol t’a t il déjà retrouvé? Ça ne peut pas être eux, pourquoi utiliseraient-ils l’aspirateur? Le seul aspirateur que tu possèdes est un robot qui fonctionne en autonome et est surtout insonore, tu n’as jamais pu te résoudre aux tâches ménagères, tu as toujours pu t’acheter ou bricoler sur place avec les moyens du bord des machines(les bases sont enseignes dans les écoles du G-12, dans les études pratiques, le genre de cour que les gosses préfèrent sécher avec assiduité) pour faire le boulot. Le bruit fonctionne très bien pour perturber tes sens, tu n’entends presque rien, à peine tes battements de cœur, l’air qui s’échappe du filtre pollue l’atmosphère bloquant ton sens de l’odorat, tu ne peux déterminer si la personne derrière la porte est un homme, une femme ou quoi que ce soit d’autres. Qu’est ce qui aurait pu franchir le dispositif anti personnel de ton appartement. Tu ouvres la porte violement espérant surprendre ton adversaire potentiel et te retrouve devant… Dalia médusée de te voir surgir de la sorte hors de ta chambre en caleçon, les cheveux ébouriffés, le regard agressif. Elle tient l’aspirateur, tu demandes ce qu’elle fait ici, sa mine se rembrunit, elle a mal compris ta question. Elle t’explique que cela faisait un moment qu’elle voulait venir mais ne pouvait s’y résoudre, hors quand elle a finalement eu le courage de venir, elle t’a trouvé par terre couvert de vomissure et visiblement extenué. Elle t’a nettoyé du mieux qu’elle le pouvait, puis avec l’aide de son frère t’a mis sur ton lit, mais il ne pouvait rester, elle a ensuite préparé ton petit déjeuner et a pris sur elle pour nettoyer du mieux qu’elle a pu. Elle apparait tendue, comme si elle faisait un effort pour être là. Pour toi, l’histoire prend une tout autre dimension, tu sais que le système ultra son aurait dû la tenir éloignée, elle est son frère. Son frère n’est entré que pour l’aider ce qui dénote un lien assez fort entre les deux, mais pire encore, elle est restée. Tu n’as plus le droit d’avoir un doute pour ses sentiments pour toi, ni de sa force de caractère, tu continues de la sous-estimer. Ce qui n’arrange pas la liste de tes problèmes. Ce qui suit surprend même toi, tu lui demandes à s’assoir et lui dit tout, qui tu es, ce que tu as fait (enfin presque certaine choses ne peuvent sortir), la session tourne à la confession, tu déverses ta conscience en continue, tes yeux s’embrument par moment à ressasser tes crimes, les douleurs que tu essaies d’oublier. Tu sais surtout que quelque part dans ton esprit tu veux qu’elle ait peur, qu’elle se rende compte du monstre que tu es, qu’elle s’enfuit et ne revienne jamais, qu’elle se trouve quelqu’un de bien et qu’elle soit heureuse. Tu en es terrifié, mais tu sais que c’est ce qui est le mieux pour elle, aimer quelqu’un c’est surtout vouloir ce qu’il y a de mieux pour eux, et tu n’es pas ce qu’il y a de mieux pour elle. Tu présentes tes crimes sous la pire lumière, tu fais ce que tu as reproché à ta société de faire toute ta vie, tu lui enlèves le choix. Et elle t’écoute, patiemment, progressivement horrifiée par ce qu’elle entend, pourtant elle reste là. Tu finis par les récents événements, extenué, dégouté par qui tu es, terrassé par tes péchés, tu espères et craint qu’elle s’en aille, tu sais qu’elle va partir, tu viens de la perdre. Elle te regarde dans les yeux un long moment, entre incrédulité et horreur, se lève doucement et se dirige vers la porte. Ton cœur s’arrête de battre, tu sais qu’elle choisit la meilleure option, pas celle qui tu aurais préféré, mais tu sais combien une histoire entre vous deux est impossible, elle prend la meilleure décision, celle que tu veux qu’elle prenne, une chance au bonheur. Tu en es à la fois heureux et triste à en crever, il lui faut une éternité pour atteindre la porte d’entrée, là elle s’arrête. Ferme la porte et débranche l’ultra son. Tu la vois se détendre d’un seul coup. Elle revient s’assoir en face de toi. Le regard qu’elle te lance pourrait changer le plomb en or. Elle ne te dit qu’elle n’a que deux chose à te dire, 1) ce n’est pas une machine qui la fera partir, 2) tu as du temps pour trouver une solution au Fidelis, elle préfère attendre le troisième rendez-vous.
En état de choc, tu ne peux que réaliser que ton esprit travaille furieusement pour trouver une solution, puis… tu l’as trouvé. Elle t’a enlevé le choix, et pourtant tu ne peux lui en vouloir.

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