Ils ont lutté longtemps contre vents et marées.
Ils ont bravé les tempêtes et les embruns salés.
Des nuits et des jours à se voir ballotés,
Pour un jour, voir l’éclaircie espérée.
Ils ont navigué sur les océans glacés,
Les bras lourds et les poings serrés
Sur les rames de bois aux poignées ferrées.
Ils étaient un équipage de vingt guerriers,
Le caractère bien trempé et la peau tannée.
Ils avaient fière allure, ces soldats du passé.
Ils vivaient à la dure, leurs longues traversées.
Ils ont laissé derrière eux leurs femmes éplorées,
Leurs enfants jouantsur la plage des batailles rangées.
Ils sont partis il y a bien des jours,
Avec armes et bagages sans espoir de retour.
Aujourd’hui, ils voient enfin la fin du parcours.
A l’horizon se dessine une terre au parfum de labour.
C’est le temps de l’épée qu’ils cherchent de leurs doigts gourds.
Lorsqu’ils touchent la plage, de la quille ensablée,
Ils se ruent d’un seul cri, dans la sanglante mêlée.
Les habitants des lieux regardent effarés,
Ces soldats des enfers, aux casques encornés,
Qui avancent en furie meurtrière, sans aucune pitié.
La journée passe sous les cris désespérés
Des hommes égorgés et des femmes violées.
Les villages sont brûlés.
Les greniers sont pillés.
Cet hiver, il n’y aura plus de blé
Pour nourrir les orphelins affamés.
Le soir venu, les guerriers sont lassés
Du bruit, de la fureur et du sang versé.
Ils se sont rassemblés pour donner un banquet,
Ils ont chanté et bu le vin à pleines gorgées.
La tête leur tourne et les emmène à rêver.
Ils se voient de retour, dans les bras de l’aimée,
Pour lui offrir la fortune, de leurs bras chargés.
Ils voient leurs fils qui sont leur fierté,
Ils pleurent au souvenir de leurs filles bonnes à marier.
Ainsi va la vie de ces hommes enragés.
Une vie de rapines dans des villages saccagés
Une vie d’aventures et de mille dangers.
Mais ne vous y trompez pas,Ne les prenez pas pour une horde de rats
Que la misère aura jeté sur vos pas.
Ce ne sont pas des bêtes, ils sont bien plus que ça.
Ce sont des hommes, comme vous et moi.
Des êtres que les dieux ont jetés sur des terres stériles.
Ils n’ont pas d’autre choix, que de se ruer sur vos villes.
Leurs ventres ont faim.
Ils ne voudraient qu’une chose, qu’on leur tende la main,
Qu’on leur fasse une place, pour y gagner leur pain,
Y élever leurs enfants et leur offrir de beaux lendemains.
Ce soir, le sang sur leurs lames, qu’ils auront essuyées,
C’est un peu de leur âme qui y aura séché.
Ecoutez chanter ces terribles guerriers.
Regardez les danser sur leurs victimes suppliciées.
De cette orgie macabre, sachez qu’à la fin,
Le temps fera son œuvre et il ne restera rien.
Plus de cris, plus de sang.
Rien que le souffle du vent.
Et quelques pierres dressées
Sur des tombes oubliées.
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