Azerkan William Hodge « L’homme du XXI siècles »
Il fallut attendre la troisième expansion d’Intra Mundus pour réveiller le prisonnier Azer Hodge de son long sommeil cryogénique. Il fit preuve d’une force et d’une brutalité hors du commun, faisant même concurrence à l’ignoble race inséctoide qu’Intra Mundus rencontra durant sa conquête.
Pour le remercier, les chevaliers – rois l’intégrèrent dans l’ordre des patrouilleurs dont la mission était de surveiller les frontières dimensionnelles du collectif.
1 Cristal, bête impie et temple maudit.
Je cherchai un endroit pour me cacher et m’enfuir par la suite de cette horrible réalité. Durant trente minutes, je piquais un sprint à découvert, laissant pour les autres la discrétion et les pas veloutés. D’ailleurs, les deux lunes semblaient rondes et je crois que personne n’aurait manqué le spectacle particulier que j’offrais à ce moment-là. J’étais équipé d’un exosquelette homologué pour les patrouilleurs dimensionnels et qui me permettaient, soyez-en sûr de ridiculiser n’importe quel athlète dans tous les domaines sportifs existants.
Je me trouvais dans une sorte de canyon, presque aussi grand que celui qui était sur Terre à mon époque. J’avais laissé mon véhicule transdimensionel à l’intérieur d’un léger renfoncement le temps de chercher l’objet de ma quête.
Je fis une pause un instant pour suivre le curseur que mon casque afficha et repérer l’endroit.
Mon corps baignait dans la sueur. Courir vite et longtemps n’était pas du tout reposant malgré mon équipement.
Je posai un dernier regard sur l’archaïque cité, grimaçant de dégout en repensant aux événements dont j’avais été le témoin dans l’enceinte de leur temple. À la base, ma mission consistait à récupérer un artefact, un genre de cristal d’où émanait une chaleur étrange aux reflets boréaux qui invitaient à la contemplation. Mes capteurs n’indiquèrent aucune informations pas plus que mes supérieurs. Une mission pour le moins banale et facile. C’était sans compter sur les cinglés qu’ils vénéraient au fin fond d’un bâtiment impie. Ces créatures étaient ignobles, ils possédaient la forme d’un cylindre d’un mètre et demi surplombé par une sorte de dôme, comme un bol retourné. Ils arboraient plusieurs membres qui leur servaient de bras, qu’ils pouvaient ranger. Leur corps suintait sur leur peau squameuse grise – vert. On pouvait entendre un bruit de succion quand leur tronc se mouvait sur le sol de marbre noir de ce bâtiment impie. Honnêtement, je ne voulais pas savoir ce qu’il vénérait avec ce caillou. J’avais donc décidé de m’en emparer rapidement et de filer à l’anglaise. Quelque chose dans ce temple m’avait secoué profondément. Une odeur de charogne filtrait à travers mon casque et je n’avais jamais vu de créatures dégager une aura aussi… dérangeante.
La cité semblait morte, on ne voyait nul torche ou signe d’activité. Elle ressemblait à une énorme forteresse maudite avec son marbre noir et ses bâtiments géants. On aurait pu croire qu’une race de géant habitait là il y « a dix siècles. Mes pensées furent interrompues par quelque chose d’inquiétant. Dans le ciel nocturne se dégageaient trois silhouettes qui semblaient voler dans ma direction. Mon zoom ne me permit pas de voir les détails. Mais des humanoïdes chevauchaient des bêtes charnues aux ailes de chauve-souris. Mon instinct me hurla de m’enfuir, je mis en branle les muscles de mes jambes pour sauver mon âme qui semblait menacée par ceux venus des airs. Je tenais fermement le cristal dans mes mains et commença à bondir pour m’éloigner dans l’obscurité que pouvait offrir le fond du canyon. Cela ne servit à rien, les ailes de ces choses propulsaient mes poursuivants à une vitesse plus grande.
Je n’eus pas le temps de me retourner que je sentis un coup violent sur mon dos qui me propulsa sur mes genoux. Les créatures fondirent sur moi en lacérant de leurs griffes mon torse. L’armure me protégeait bien et je ne doute pas un instant que sans celle-ci je n’aurai était qu’un morceau de viande chaud sur le sol. Je ne voyais plus qu’un amas de gueule aux dents acérées et des griffes dans mon champ de vision. Le cristal avait disparu surement attrapé au passage par un des humanoïdes que je ne pouvais pas encore distinguer.
Au comble du désespoir mon sang terrien prit le dessus et je me laissais guider par une sauvagerie primordiale, ma main tira sur un bout de mon armure pour le pointer droit sur mes ennemis. Une lame rétractable transperça le crâne d’une des créatures giclant au passage des morceaux de cervelle. Une patte fit tomber l’épée, mais l’effet était là, l’attaque cessa aussitôt et les agresseurs reprirent leur envol tournoyant autour de moi comme des vautours.
_Aqnork kul Arnaz tok bak AK LEKRESH ! s’exclama l’humanoïde qui était un instant plus tôt sur le dos de la monture que j’avais transpercée.
J’étais abasourdi par la différence entre l’humanoïde et les créatures du temple. Il s’agissait d’un proto humain avoisinant les deux mètres. Son corps était recouvert de peintures et sa peau était luisante un peu à la manière des prêtres de la cité. Les traits du visage étaient grossiers et des dents limées étincelaient au clair des lunes. Un implant dans mon crâne me permit de comprendre à peu près ce qu’il venait de dire.
_Tu vas payer pour ça, je vais te fendre LA TÊTE !
Il bondit sur moi avec rage, j’allais à sa rencontre adoptant une posture de boxe. Je pus esquiver un coup qui aurait pu détacher ma tête de mon corps. Il était puissant et plus imposant que moi, mais il n’avait aucune technique. Je plongeai sous lui pour décocher un uppercut avec l’aide de l’armure, la force multiplée par mon équipement le fit décoller légèrement du sol avant de s’écraser lourdement. Les autres avaient assisté à la scène en ne pensant pas que je me défendrais aussi bien.
Les deux bêtes noires s’immobilisèrent à terre non loin de ma position. Un des humanoïdes sortit d’un objet qu’il glissa entre ses lèvres charnues. Je le vis souffler dedans à plusieurs reprise comme s’il entonnait un chant inaudible. À ce moment, j’entendis un bourdonnement dans mon crâne, le son était puissant, vibrant et j’avais l’impression qu’il emplissait ma tête au point de la faire exploser. Cette douleur était pire que tout ce que j’avais vécu, je me demandais même si un humain l’avait déjà ressentie. Je retirai mon casque violemment pour pouvoir encercler ma tête de mes mains comme pour l’empêcher de partir. Il continua à souffler dans l’objet dirigeant son rayon mortel sur moi. L’étreinte de la mort me paraissait être la seule échappatoire à ce mal. C’est là que je perdis connaissance.
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