Faire la liste des communautés teutonnes que l’on a visité serait long et fastidieux, mais c’était surtout la qualité qui m’intéressait, j’avais rarement été témoin d’une telle concentration de détraqués mentales, supporter du Bayern de Munich et autre dangerosité (il y avait un culte basé sur le fait que les teletubbies étaient la plus haute avancée culturelle du 20eme siècle et un autre qui soutenait qu’Arsène Wenger était actuellement la dernière réincarnation du Christ… Arsène Wenger…. les gens sont dingues j’vous jure… Zinedine Zidane à la rigueur…). D’ailleurs on venait juste de semer les derniers, apparemment Ilgueu était la réincarnation d’une divinité de l’amour locale qu’il fallait féconder pour préserver la race humaine… féconder ou bouffer j’avais du mal à suivre, on s’était retrouvé avec une bande de gus tous dans les 2 mètres 20 de haut, 200 kilos en moyenne, habillés en peau de bête (ça ou ils étaient vraiment plus poilu que moi, dur à dire vu qu’ils ne s’étaient visiblement jamais rasés non plus), ce coup-ci c’était d’ailleurs Ilgueu qui avait d’abord montrée quelques signes d’anxiété, elle était arrivée à la moto avant moi…. visiblement les goths étaient invulnérables aux capacités de persuasion de la petite… pas qu’elle ait vraiment essayée non plus. Elle aura tenu jusqu’à ce que l’un d’entre eux sortent une sorte de gourdin et lui explique ce qu’il comptait en faire… je n’ai pas non plus vraiment tout suivis… Le monsieur venait juste de finir sa phrase que la petite me regardait avec ses grands yeux bleus et me sortait:
– Pa…Partir! Mainnant!!!!!!
Avec le recul, j’aurai peut-être dû leur donner une deuxième chance, ils avaient visiblement quelques capacités dans l’enseignement linguistique… J’avais essayé de faire la même plaisanterie avec Ilgueu…je n’essaierai plus…. les filles et le sens de l’humour…
Enfin, quelques semaines plus tard (garder en tête, le printemps allemand correspond au plein hiver chez nous…), nous tombions sur une énième communauté, bien planquée elle aussi (c’est fou combien il en restait d’ailleurs, j’étais le seul sur la route? On dira ce qu’on voudra des Allemands, ces gus sont de vrais survivants il y avait là plus de communautés que j’en avais croisé dans les restes du monde, et finalement tout aussi présentables que les autres… (faudrait un jour que je vous raconte ce que j’ai trouvé aux abords du Bois de Boulogne à Paris… ou plutôt non, il y a des choses qu’il vaut mieux garder sous secret). Et là après les fouilles d’usages et les confrontations verbales pour être sûr que je ne comprenne rien, s’approchait une bien sympathique vieille dame, qui me fit la courtoisie de me parler en anglais. Il semblerait qu’Ilgueu leur ait bien expliquée que j’étais un parfait imbécile incapable de comprendre quoi que ce soit de leur sons gutturaux, la chef de la communauté (une ancienne prof d’anglais) se décidait donc d’utiliser un langage à peine plus civilisé.
Là je fis donc un résumé succinct des circonstances de notre visite, Ilgueu (visiblement j’avais au moins bien compris son nom) a vite été placée avec des petits camarades de son âge et dont elle avait déjà visiblement assumée la direction d’une main de fer. Mon hôtesse (Franz) me fit donc faire le tour de son domaine, me fourrant un strudel dans une main et une bière dans l’autre. Je pensais enfin avoir trouvé un endroit plus ou moins convenable pour la petite, je n’ai percuté que bien plus tard que la plupart des questions que Franz me posait tournaient autour de mes compétences en technologie solaire. Bon pour ma défense je plaiderai les regards langoureux projetés par de jeunes demoiselles peu farouches… raison qui pourrait expliquer que je sois resté bien plus longtemps que je ne l’avais prévu…en fait raison qui expliquait totalement ce fait, votre honneur 12 ans de célibat, j’étais certes coupable mais pas repentant (de toutes manières j’avais demandé leur carte d’identité votre honneur…). Mais bien sur le bug du voyage me retrouvait bien assez vite, et je décidais de repartir en laissant couvertures et autres poupées.
J’admettrai, sous la torture, avoir été assez déçu quand Ilgueu s’est pointée le jour du de mon départ. Après tout, je n’aurai pas dû être étonné, je ne la voyais que pendant les repas où elle utilisait je ne sais quel moyen de torture pour s’assurer que j’ai trois fois la ration moyenne de nourriture par devoir, pitié, à moins qu’elle n’est essayée de m’abattre par repas interposé pour me faire partir un peu plus vite, j’imaginai bien que mes piètres talents pour l’Allemand devaient lui faire un peu honte. Mais bon… le jour du départ donc, elle s’était approchée de moi avec un mine hésitante quelque chose à laquelle elle ne m’avait pas habitué, et là elle me jetait son:
– Pa. … partir!
Bon c’est vrai que c’était un peu ce que je recherchai, mais je pensais que notre temps ensemble… enfin qu’elle m’appréciait un peu plus que ça quoi… Bah c’était normale après tout, elle avait ici des amis, des gens qui comprenaient ce qu’elle racontait, elle serait mieux avec eux, qu’avec moi dans mon pénitencier… Enfin c’est comme d’habitude dans toutes les séparations on préfère que ça vienne de soi… Remarque, il valait mieux qu’elle le prenne comme ça, même si ça ne faisait pas plaisir, c’est quelque chose avec lequel je pourrai vivre. Je lui expliquais qu’elle pouvait rester avec ses nouveaux amis, que ça ne me gênait pas, que je voulais juste qu’elle soit heureuse… C’est là qu’elle s’en est allé courir, un bras sur le visage, ses nouveaux amis en remorque, même pas partie, déjà remplacé… Remarque… normal, avais-je plus de considération pour mes parents à cet âge? Je ne pourrais pas le jurer.
Je me contentai d’une vague remarque lui promettant de revenir…je doute qu’elle m’ait entendu de toutes façons. Franz s’est alors avancée pour me dire que pour le développement de la petite il vaudrait peut être mieux ne pas revenir à moins que je ne décide de m’installer, à cet âge les enfants ont besoin de stabilité… Elle avait sans doute raison, que savais-je du développement psychologique des enfants? Pas que ça me faisait plaisir, mais c’était le bien d’Ilgueu qui comptait avant tout, je me voyais mal pouvoir rester au même endroit jusqu’à la fin de mes jours, et j’avais déjà démontré mes piètres limites dans mes capacités à assurer son bien-être. Le cœur un peu plus lourd qu’a l’accoutumé, je décidai de repartir sur les routes, voir à quoi pourrait ressembler New Dehli à cette époque de l’année.
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