« Celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre. »
Karl Marx
» Excusez-moi monsieur, j’ai dû me perdre, sauriez vous où se trouve le centre-ville ?
Évidemment que tu t’es perdu, tu te perds toujours dans tes pensées et si c’est le centre-ville que tu cherches, cherches un peu plus profond dans toi-même surtout lorsque l’extérieur risque de s’avérer trop dangereux pour toi.
Pardon ? Qu’est-ce que… mais attendez monsieur ! Vous avez oublié votre porte-feuille ! »
C’est alors que je lus son nom : Andar, Esprit Guide. « Esprit Guide » ? Mais qu’est-ce-que que c’est que ça ? Et qu’est-ce-qu’il a bien pu vouloir me dire ? Ça n’a aucun sens ! Mais, où est passé le porte-feuille, je l’avais dans la main ?
* * *
«« Il serait peut-être temps de changer de perfusion, non ? »
– Mettez lui quelque chose de plus fort, il risque de se réveiller et je ne pense pas que dans son état cela soit conseillé.
– Je pense que c’est trop tard, je vais quand même chercher d’autres anesthésiques »
C’est alors que je repris conscience de mon corps ou alors juste de mon esprit, puisque je ne parvins pas à produire le moindre son, et encore moins de bouger le corps. Je commençais à paniquer, cherchais désespérément à m’exprimer, à bouger, à sortir de cette lourde torpeur qui m’oppressait et m’emprisonnait dans mon propre corps.
« Monsieur ! Jeune homme ! Arrêtez vous allez rechuter ! » S’exclama une voix qui me semblait moins lointaine que tout à l’heure.
Malgré le malaise profond que je ressentais à cause de mon immobilité forcée, je réussi à me calmer progressivement. Respirant lentement, je puis progressivement prendre conscience du lieu dans lequel je me trouvais.
J’étais dans une petite chambre sobre, une table de chevet à côté de mon lit et une armoire remplit de quelques affaires constituaient le seul mobilier de la pièce. Quelques appareils médicaux branchés sur moi venait me rappeler l’état dans lequel j’étais. J’arrivais à deviner vaguement le reste de la pièce que je ne pouvais apercevoir, ne pouvant tourner la tête, j’essayais également de m’imaginer la vue qu’il devait y avoir de la fenêtre qui était à ma gauche, j’entendais quelques oiseaux chanter, mais ce fut tout, le reste était couvert par le bruit venant du couloir.
« Bon, je crois qu’il nous a encore lâché, comment peut-on être aussi rêveur ? Passes moi la seringue, demanda la voix qui ne semblait pas beaucoup m’aimer. Voilà. Jeune homme ? Vous m’entendez ? Ça risque de piquer un peu. Attends, j’oubliais, en fait vous n’allez rien sentir parce que… Mais elle n’eut pas le temps de continuer : l’autre voix plus agréable la coupa.
– Arrêtes ! Tu veux qu’il fasse des cauchemars ? On lui dira quand il sera remis. Fait de beaux rêves…. »
Je n’entendis ensuite que quelques sons étouffés, l’anesthésiant devait déjà faire effet…
* * *
« Déjà ? Mais tu ne pourrais tu pas arrêter de te perdre ? J’ai d’autre chose à faire que de te retrouver sans arrêts.
– Mais je ne me souviens même pas comment je suis arrivé ici !
– C’est bien ce que je dis : tu es perdu, si tu continus à te perdre tout le temps ils pourront faire ce qu’ils veulent à ton esprit.
– Mais je ne comprends toujours pas, qu’est-ce que vous êtes ? De qui parlez vous ? Pourquoi tant de mystères ? »
* * *
« Eh ben dis donc ! C’est qu’il résiste bien aux somnifères celui là !
– Avec ce qu’il s’est passé il devrait être mort de fatigue, il a peut-être juste faim, vous pourriez lui augmenter sa dose de glucide s’il vous plaît ?
– Tout de suite madame, quand pensez vous qu’il puisse…redevenir autonome ? »
J’émergeais de mon sommeil avec une migraine insupportable, quoiqu’elle devait déjà être là la première fois, mais je devais être tellement perturbé que je ne l’ai pas sentis. Je parvins néant-moins à reconnaître les deux voix qui s’entretenaient juste à côté de mon lit. A les entendre je devais avoir subi un grave accident, un accident assez grave pour m’empêcher de bouger et de parler. J’étais incapable de dire si j’étais gravement blessé, en fait il se pourrait même que j’ai été victime d’un accident bête qui m’aurait paralysé. J’espérais être bientôt remis et pouvoir à nouveau courir, parler, chanter et…. Mince, j’avais oublié que je ne savais pas chanter… Oublié….
« … à pu être gravement atteint, il semble éveille, mais il se pose beaucoup de questions, ça se voit dans ses yeux. Il peut ne pas se souvenir, expliqua la voix à quelqu’un que je ne pouvais voir.
– Et s’il se souvenait quand même ? Je ne peux pas prendre de risques, vous avez un mois pour me le remettre sur pied, après ils auront eut tout le temps de se préparer.
– Mais l’endroit est sûr, il n’y a aucun risque. Et il ne sera jamais prêt dans un mois, c’est à peine s’il pourra parler.
– Et il lui faudra se réadapter à son corps, ça fait déjà deux mois qu’il n’a plus bougé, il ne…. Mais la voix aimable ne put finir.
– Dans un mois ils seront prêts, que lui le soit où pas, je pourrais les retenir deux semaines de plus, mais pas au-delà. Donnez lui ça quand il pourra marcher. »
La personne qui pressait mes deux soignantes leur donna quelque chose que je n’eus que le temps d’apercevoir, cela ressemblait à un sac, mais je n’eus pas le loisir de le voir plus longtemps. Après avoir salué les deux femmes il s’en alla. Peu après, l’infirmière que j’appréciais de plus en plus me regarda et soupira :
« Un mois et demi pour remarcher, alors qu’il t’a fallu plus de deux mois pour ouvrir les yeux…
– Je vais retourner le voir et lui dire deux mots, on connaît mieux notre métier que lui ! S’énerva la seconde voix.
– Il n’est pas à blâmer, il fait de son mieux de son côté pour que nous puissions faire de même avec lui. Dit-elle en me regardant.
– Pourquoi est-ce que tu le défends ? Tu as vu l’état dans lequel il est ? On ne pourra jamais le refaire marcher en un moi et je doute que cela soit possible avant au moins six mois !
– En effet, pas avec les méthodes traditionnelles, dit-elle en me souriant.
– Les…les méthodes traditionnelles ? Tu ne penses quand même pas à…. »
L’infirmière qui m’effrayait au début semblait maintenant effrayé par sa collègue. Tout cela me semblait de plus en plus flou, compliqué et surtout, j’avais l’impression que tout le monde savait ce qu’il devait faire, sauf moi et l’autre infirmière. Elle quitta la pièce en lâchant : « Je ne veux pas m’en mêler, fais ce que tu veux, mais ne le tue pas, je n’ai pas envie d’avoir de mauvaises statistiques. »
Je me rendormis peu après, il m’avait semblé entendre l’infirmière mystérieuse me souffler de ne pas m’inquiéter et de faire de beaux rêves, mais je n’en étais plus sûr, j’étais abattu par toutes les questions qui se posaient en moi et me demandais si je n’étais pas en train de rêver depuis le début…
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