« L’uniformisation du monde commence avec la standardisation de la langue qui nous sert à le désigner. Les mots sont coupés de leur mémoire, dévoyés de leur sens premier, quand ils ne sont pas remplacés par des néologismes proches des logotypes. Le marché des mots est réduit aux mots du marché. Dessinant l’horizon des possibles, la déclinaison au global de tous les phénomènes et processus sociaux fabrique le nouveau sens commun. Dans la production de l’imaginaire autour de ce devenir balisé, la technologie et le discours d’accompagnement qui la sert occupent une position décisive et singulière. Ainsi
en va-t-il des apologies de la « société de l’information » promue paradigme dominant du changement social et caution d’un monde « plus solidaire, transparent, libre, égalitaire ». Or la société promise dont est créditée la nouvelle ressource informationnelle ne délivre son sens que dans une configuration géopolitique. Les visions instrumentales du cyberespace contribuent à le faire oublier. »
Armand Mattelart, Histoire de la Société de l’Information, quatrième édtion, pp. 3, editions La Découverte, Collection Reperes.
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