L’homme qui était sur la terrasse du bar, très tôt dans la matinée, se trouve désormais dans l’unique église du village. Agenouillé devant une statue à l’effigie féminine, l’habitant semble attendre une manifestation de cette dernière. Toutefois, l’élément en pierre ne bouge pas et ne provoque aucun bruit. Au moment où l’homme montre des signes d’impatience, les portes de l’église s’ouvrent sur une silhouette gracieuse qui s’empresse d’entrer dans la résidence religieuse. Dès qu’elle se trouve à quelques centimètres de l’homme, elle daigne lui adresser la parole.
– Alors ?
Sachant très bien l’identité de la personne qui lui parle à cet instant précis, le client du bar se met debout et une fois sur ses jambes, il ne prend même pas la peine de se retourner.
– Aucune larme, répond-il.
– Voilà qui est étrange, poursuit la femme qui porte aussitôt l’une de ses mains sous son menton.
Dans cette position, elle s’accorde un temps de réflexion tandis que ses longs cheveux noirs ondulent sous l’effet du vent qui s’engouffre dans l’église.
– Tu crois qu’on nous aurait menti ? Questionne l’homme.
– Non. Par contre, il se peut que l’histoire se soit modifiée à cause de sa présence.
– Tu veux parler de celui qui vient tout juste d’arriver en ville ?
– Oui Ben.
– Dans ce cas, sache que ton raisonnement est vérifiable.
Ben quitte sa jeune amie pour s’approcher d’un cierge se situant sur un autel. Celui-ci se tient derrière la vierge et dès que l’individu s’immobilise, l’ambiance dans l’église change peu à peu. Ensuite, le villageois pose ses mains sur chaque côté du cierge et fixe la flamme. Tout à coup, celle-ci gagne en hauteur et s’élargie par la même occasion. Sous ce brusque changement, Ben se concentre.
Pendant ce temps, Joris fait connaissance avec Pierre, un homme bien plus âgé que lui et qui a les cheveux rouges et les yeux de la même couleur. Leur rencontre s’est faite lorsque le visiteur est sorti de l’hôtel du village dans lequel il s’est loué une chambre. Tranquillement, les deux garçons se promènent en ville et tout en marchant, le premier discute avec le second qui présente des signes de nervosité. En effet, le jeune étudiant sent le regard des habitants se poster sur lui et forcément, il n’apprécie guère cette attitude de leur part. Alors que les deux jeunes hommes s’enfoncent dans une ruelle, Joris constate que les curieux y sont moins nombreux. Aussitôt, le nouvel ami de Pierre n’hésite pas à souffler et à dire ce qu’il pense.
– Tu aurais dû me faire passer par ici bien plus tôt, dit-il.
– Pourquoi ?
– Parce que les gens de ce village m’énervent. Pourquoi me dévisagent-ils comme ils le font.
– C’est parce que nous ne sommes pas habitués d’avoir des visiteurs.
– A ce point ?
En guise de réponse, Pierre se contente d’hocher positivement de la tête. Alors que les questions continuent de se bousculer dans la tête de Joris, son guide se montre curieux.
– Comment as-tu trouvé notre village ?
Suite à cette interrogation, Joris arrête de marcher et regarde son camarade. Lorsque celui-ci ne sent plus la présence du visiteur à ses côtés, il se retourne pour constater son immobilisation.
– Un souci ?
– Oui et il a un rapport avec ta question. Comment peux-tu me demander de quelle façon j’ai trouvé votre village ?
– Tu le sauras bien assez tôt.
– Quoi ?
Joris trouve son guide très bizarre lui aussi. Ne voulant rester davantage dans le coin, l’étranger tourne sur ses talons et se presse de marcher vers la sortie de la rue. Voyant la tournure que prend cette promenade, Pierre le suit rapidement.
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