PROLOGUE
Le petit bâillon frémit à peine, un mouvement infime qui attestait qu’il vivait encore. La femme retira la capuche sombre qui masquait son visage et fit signe au garde de déverrouiller la cellule.
La porte grinça en se fermant et elle se retrouva seule, en présence de ce que contenait la geôle. Une forme recroquevillée, voûtée, assise sous la lumière rougeâtre. Son dos, ses bras, étaient couturés de cicatrices. Elle le savait, bien que les marques soient invisibles sous la camisole qui emprisonnait le corps. De rares cheveux filasse partaient du front nu et pendaient négligemment le long du harnais. Les sangles avaient été resserrées à sa demande. Bien que l’humidité, le moisi, les rongeaient depuis des années, les liens tenaient bon.
— Tu peux m’éviter, mais tu ne survivras pas davantage.
Elle fit un pas de plus. La camisole craqua sous la tension des muscles de la bête.
— Je connais ton mal, je connais ton espèce. Et toi, je te connais mieux que quiconque. Aie confiance, nous nous apporterons bien plus que tu ne le penses.
Le silence…à peine troublé par le craquement du cuir qui enserrait les membres de la bête.
La Femme esquissa un sourire à peine visible dans l’obscurité. Une fine ride se dessina au coin de sa bouche.
— Tiens, voilà un petit cadeau, pour aider ton esprit à se détendre… et ton appétit à se faire moins violent.
Elle fit volte-face dans un bruissement de tissus. La porte grinça quand elle l’ouvrit. Alors qu’elle s’apprêtait à quitter la cellule, elle crut bon de préciser :
— Oh, j’avais oublié, il est frais.
Enfin la porte claqua et elle disparut vers la surface.
Un hurlement, où résonnaient toutes les souffrances des Enfers, retentit dans l’obscurité rougeâtre que nul ne put entendre.
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